Une telle saisie est-elle possible en France ?
On pourrait en douter tant notre pays se fiche de la contrefaçon artistique, source pourtant d’un des principaux trafics planétaires, qui se chiffre en milliards d’euros.
Certaines périodes sont tellement infestées, comme l’art déco, que les spécialistes considèrent que la majorité des objets sont des faux.
Très inquiets, les ayants droit en arts décoratifs (Giacometti, Le Corbusier, Frank, Terry…) se sont regroupés pour faire avancer leur cause, mais ils se heurtent à l’inertie des pouvoirs publics.
Le contraste est criant avec la mobilisation en faveur des marques (Vuitton, Cartier…), dans laquelle, au contraire, la France se montre en pointe. L’observatoire européen de la contrefaçon ne dispose d’aucun outil statistique dans le domaine artistique. Le ministère de la Culture et sa direction des arts plastiques, pourtant censée défendre le patrimoine, ont toujours brillé par leur inaction. Même refus de la part du service des fraudes de la DGCCRF.
Cet été, la direction de la police judiciaire, plus préoccupée par les statistiques d’interpellations, a démantelé le bureau chargé de la contrefaçon industrielle et artistique. Elle a promis de confier cette dernière mission à l’office central de lutte contre le trafic des biens culturels, ce qui serait logique, mais sans lui accorder, à ce jour, les moyens en conséquence.
Si la législation sur la contrefaçon industrielle a été adaptée en 2007, le faux en art reste largement impuni. Vous n’avez pas le droit de posséder une fausse chemise Lacoste, qui doit être détruite, mais cela ne s’applique pas à un faux Rodin ou Van Gogh. La douane n’a pas non plus le droit, de sa propre initiative, de retenir une fausse statue ou peinture. Cette inconscience a favorisé en France la falsification de l’art décoratif du XXe siècle, qui a pris une ampleur dramatique ces dernières années.
Vincent Noce - Libération du 28 août 2009